D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été organisée, non pas forcément pour le contrôle, mais parce que comme le dit mon père, pour être fainéant, il faut être organisé. Être organisé te permet juste de concentrer ton attention à ce qui est présent. C'est juste déployer son énergie aux choses importantes et ne pas la dilapider dans des pertes de temps inutiles. Structurer l'espace autour de soi pour décider de l’énergie qui te parvient. Chez moi et maintenant dans mon van, c'est toujours rangé, pas parce que je suis maniac, parce que je choisis d’être entourée d'harmonie et d'équilibre. L'énergie qui t'entoure conditionne ton état d'esprit, dans le désordre, c'est désordonné en toi. L'organisation est donc d'un certain point de vue le choix de la simplicité et de l'harmonie.
Néanmoins, l’organisation, lorsqu'elle manque de flexibilité, deviens une forme de contrôle, et cela, j'y ai passé du temps, beaucoup. L'organisation est devenue la zone de confort, avoir le contrôle pour être en sécurité. C'est naturel, mais limitant. Tu choisis les choses en fonction de ce que tu connais, tu te maintiens dans des zones de sécurité, c'est naturel, c'est sûr. Mais c'est aussi te déconnecter de tes ressources, comme sélectionner les possibles auxquels tu te donnes accès.
En vivant en van, tu t’aperçois vite que tu ne contrôle plus rien, c'est effrayant vraiment. Il n'y a plus rien à quoi te raccrocher à part toi-même, tes propres ressources. Ça nécessite une sacré confiance en soi et c'est la première étape, reconnecter tes possibles et la confiance et puis surtout ne rien avoir à perdre, être ok avec toi, les autres ce qui est vécu, parce que clairement, dans le trou du cul de la pampa, il peut tout arriver.... J'ai longtemps eu des angoisses le soir à l'endormissement, la peur de mourir et puis j'ai réussi à les apaiser en vivant mes journées de façon à pouvoir me dire le soir, si je dois partir cette nuit, c'est ok. Et bien en van, c'est puissance mille, t'as tout intérêt à cultiver la satisfaction, parce que la moindre frustration appel des angoisses de dingue.
J'ai donc l'habitude de plutôt sur-organiser les choses, y compris et surtout dans mon travail. J'avais dans l'idée de raconter l'histoire Senseï depuis le début, dans l'ordre, mais non, ce n'est pas possible parce que la vie vient constamment nourrir le mouvement intérieur, la réflexion. S’arrêter, mettre en pause la création tant que je n'ai pas raconté ce qui précède implique de perdre la saveur de ce qui se vit et du récit qui va avec. Pour moi, l'écriture est une forme de réflexion et d’intégration des expériences, elle est une voie de compréhension et de libération, et puis un canal de transmission. Attendre que tout ce qui précède soit dit avant de commencer à mûrir ce qui est présent est un non-sens, c'est être en porte-à-faux entre hier et aujourd'hui, ça provoque une frustration immense. Alors j'accepte le désordre.
J'ai déjà pris beaucoup de leçons depuis mon départ, que je n'ai pas raconté, parce que ce n’était pas dans l'ordre, mais c'est trop frustrant, alors je choisie le désordre.
Parce que la vie, c'est l'imprévu et le partage peut se faire dans le chaos. Ce cheminement-là, Senseï & Me, j'ai envie de le partager alors j'accepte le désordre et le chaos parce que c'est cela qui est créatif, c'est la vie, et c'est à partir du désordre que les choses s'organisent et naissent.
Don voilà, je vais te raconter des choses dans le désordre, mais toujours avec authenticité et puis de temps en temps, quand ce sera juste de revenir sur le passé, je reprendrais les chapitres et puis tu t'occupera de les remettre dans l'ordre.
Voilà, étape 1, accepter le désordre, se jeter dans le chaos et y laisser glisser l'inspiration.
Elodie T