Et puis vint 2020 cette année charnière, tout aussi cruelle que merveilleuse, pour nous tous. L'épreuve qui deviendra une opportunité.
Début janvier, je commençais à exploser, je me sens enfermée, emprisonnée dans ma propre vie, encerclée de contraintes qui ressemblent à une prison que j'ai moi-même construite. Et c'est ça le pire, c'est moi qui l'ai construite...
Je suis entrepreneure depuis cinq ans, thérapeute énergéticienne. Cette voie s'est imposée comme une évidence et j'aime ce que je fais, je suis bonne dans ce que je fais et je me développe tranquillement, mais jamais assez, les charges augmentent en même temps que le chiffre et quoique je fasse, je ne m'en sors jamais. Pas de latence pour les plaisirs de la vie et encore moins pour les vacances, en 5 ans, je me suis arrêtée à peine trois semaines...
Début d'année les prémices de l'explosion sont là, j'arrive à bout de souffle, le plaisir me quitte doucement... Et pourtant, je travaille sur une collection d'ouvrages aux éditions marabout, l’aboutissement de 5 ans de travail, comme thérapeute et de 8 ans de cheminement personnel. Je compile en 4 ouvrages tout ce que je sais, toute mon expertise.
Je sais que cette collection marque la fin d'un cycle, le besoin de passer à autre chose, non pas dans mon activité, mais en moi-même, c'est un palier d’évolution, la fin d'un chapitre. Je l'aborde avec joie cette fin, car elle annonce une suite que je désire. La transmission est inhérente à ce que je suis, elle est vraiment ma marque de fabrique, éduquer pour rendre libre et ces livres sont une merveilleuse opportunité de le faire.
Pourtant, ça n'est pas simple avec la maison d’édition et le rêve se transforme malheureusement en cauchemar. La finalisation des ouvrages se fait dans la souffrance.
Et puis le covid et là, c'est tout qui est remis en question, ce qui semblait stable s’ébranle, et c'est un choc pour nous tous. Je suis tétanisée... 24 h... et puis je fonce tête baissée. L'avantage des situations d'urgence, c'est que l'on se découvre des ressources insoupçonnées jusqu'alors.
Je pensais depuis déjà trois ans à un programme en ligne et bien voilà, je n'ai plus le choix, plus d'excuses possibles. Je me mets au travail, je crée le programme Hack Yourself, tout ce que je sais, toutes mes ficelles en un programme. Je ne me pose aucune question, j'ai toujours été animée du désir de changer le monde et j'ai compris que c'est en passant par une transformation individuelle que le collectif évolue. Je me positionne comme une thérapeute militante, une fabricante d'humains libres, et ce programme, c'est ma fabrique à humains libres, un outil de transformation personnelle par l’éducation thérapeutique, je n'y retiens rien , j'y donne tout. Sans hésiter, sans sourciller, je travaille jours et nuits en plus des ouvrages à boucler.
Je lance le programme ça marche... Ouf sauvée, je n'ai pas vu disparaître cinq ans de travail.
Et puis une fois l'adrénaline, l'énergie du désespoir retombées. J'ouvre les yeux, en fait le covid me rapproche de mes rêves... il me contraint à digitaliser mon activité...
En avril, j'ai déjà réduit ma présence au cabinet, ce n'est plus possible de garder le loyer dans la situation. Mais l'activité tient bon, il y a gros vent, mais on tient le cap, on a réduit la voilure et la coque semble continuer d'avancer. Je pourrais peut-être enfin quitter Paris et monter mon petit centre à la campagne. Ça commence à cheminer...
En juillet, je suis exsangue à bout de forces, avec les livres, c’était l'enfer et comme pour nous tous l’adaptation rapide et forcée épuisante. Les murs de ma prison me semblent plus froids encore, quelque chose doit changer...
Néanmoins, je reste une optimiste, et je choisis toujours de voir dans chaque chose une opportunité. Je ne sais pas comment va tenir mon activité et pour le moment, j'ai des chiffres, je peux donc emprunter pour m'installer à la campagne maintenant que tout est en digitale.
Je fais une simulation à la banque, c'est raisonnable, et sur une intuition, je file à Angers, visiter des maisons, bien décider à tout plaquer.
Et puis comme toujours, j'ai de la chance, j'arrive chez Christina et Freddy qui louent des caravanes. Ils sont d'une bienveillance et d'une générosité incroyable et m'aident à y voir plus clair.
En visitant des maisons et en me projetant à cet endroit, je m'aperçois que je n'y suis pas. Bien, que le région soit canon, ce n'est pas là, et je ne sais pas où elle est la terre sur laquelle je veux m'ancrer. Alors je rentre bredouille de nouveau dans l'incertitude, la vie reprends son cours, et le sentiment d’oppression devient de plus en plus grand, je me sens lâcher.
Toute ma vie, je me suis battue pour rester libre, tous mes choix ont été conditionnés par l'absolue nécessité de rester libre. Un jour, je me le ferais tatouer : Vivre libre ou mourir.
J'ai perdu des amours, des boulots, des amis, de l'argent, des projets... Pour rester libre. Pas que j'ai un problème avec l’engagement, non ça, je peux, je ne veux juste pas de la dépendance, l'être ou qu'on le soit de moi . C'est pour ça que j'ai choisi très tôt de ne pas faire d'enfants, cette responsabilité-là, je ne veux pas la prendre. Je veux que mes choix n'engagent que moi. Je veux le luxe des erreurs et des balbutiements, je veux l’opportunité de la folie, je veux rester libre.
Et là, je ne le suis plus, libre, je croule sous les contraintes, la joie et le plaisir s'en vont. Mais en fait, si on y réfléchit, la liberté si chère à mon cœur, ce n'est que le choix des contraintes, car soyons honnêtes, elle n'est tout de même qu'une illusion, la liberté.
Puisque être libre c'est choisir ces contraintes, je n'ai qu'a les déplacer... Puisque je suis en quête de ma terre, je n'ai qu'a devenir mobile... Alors resurgis de mon passé ce vieux rêve, celui d'un van, depuis mes 15 ans, c'est un idéal de vie et d'ailleurs, il est partie intégrante de mon projet de vie. Une petite maison avec une autonomie énergétique et agricole, des gîtes, de quoi accueillir des séminaires et mon école, une guinguette, travailler 8 mois par an et voyager 4.
Et si tout ça n'en était que l'opportunité...
Du coup bein la voilà mon évidence, un van !
Et voilà le projet Senseï est né, on est en novembre, je le décide.